Nichée au cœur de la Corrèze, Aubazine est une destination incontournable pour les amateurs d’histoire, de patrimoine et de nature. Ce village chargé d’histoire attire des visiteurs en quête d’authenticité et de sérénité, avec ses monuments cisterciens, ses paysages préservés et ses légendes étonnantes.

Aux origines d’Aubazine

Vue sur le clocher de l'abbaye cistercienne d'Aubazine

C’est l’histoire d’un prêtre –Etienne de Vielzot, qui deviendra saint Etienne d’Obazine- qui, vers 1125, se trouve une vocation pour la vie d’ermite et s’installe près du village de Vergonzac, aujourd’hui lieu-dit de la commune d’Aubazine en Corrèze. Rapidement, les disciples affluent et la vie d’ermite n’est plus vraiment possible. La communauté ainsi constituée s’installe à 3 km de là sur des terres octroyées par le vicomte Archambault, ce qui deviendra par la suite le bourg d’Obazine. Obasina en Occitan signifiait “Forêt épaisse ». Très vite un canal est aménagé pour aménager l’eau nécessaire à la communauté naissante. Plus tard un second monastère, pour les femmes, sera bâti au fond du vallon du Coyroux.

En 1142 Obazine devient officiellement une abbaye, affiliée à l’ordre Cistercien en 1147.

Jusque-là rattachée à la paroisse du Cornil, Obazine devient une commune autonome en 1790.

En 1820 Obazine devient officiellement Aubazine, orthographe qui correspondait mieux à la prononciation locale. En réalité, selon le code officiel de l’Insee, le nom de la commune s’écrit Aubazines, même si tous les corréziens préfèrent l’écrire Aubazine.

L’abbaye d’Aubazine : Une perle de l’art cistercien

Un peu d’histoire

Fondée officiellement en 1142, l’abbaye connaitra ensuite de nombreuses vies.

  • 1147 : affiliation à l’ordre cistercien
  • 1789 : transformé en bien national par la Révolution. Les deux derniers moines cisterciens doivent partir
  • 1800 : l’abbaye devient une prison
  • 1860 : des religieuses de la congrégation du Saint Cœur de Marie s’installent et développent un internat pour jeunes filles. Une de leurs pensionnaires, Gabrielle Chanel présente dans les lieux de 1895 à 1901, deviendra plus tard célèbre sous le nom de Coco Chanel.
  • 1940 : l’orphelinat des sœurs sert de couverture pour abriter et sauver de la mort un certain nombre de jeunes femmes et fillettes juives.
  • 1962 : l’abbaye n’est plus occupée
  • 1965 : une congrégation grec-melkite catholique, contrainte par le conflit israélo-arabe de quitter Nazareth où elle était installée, pose ses valises dans l’abbaye. Il s’agit d’une congrégation de tradition byzantine mais unie à Rome.
  • 1987 : la supérieure décide de se retirer des bâtiments et laisse la Communauté du Verbe de Vie occuper leur place en tant que locataire. Les sœurs s’installent dans une ferme attenante où elles aménagent une chapelle dont les murs sont ornés de fresques byzantines.
  • 1989 : la grande majorité de la communauté décide de devenir Orthodoxe et quitte Aubazine en 1990 laissant derrière elle seulement 3 moniales souhaitant rester catholiques !
  • 2010 : du fait des travaux trop important qu’il faudrait faire dans l’abbaye, la communauté du Verbe de vie quitte les lieux.
  • 2024 : la fondation Chanel annonce un mécénat qui devrait permettre une grosse rénovation de l’abbaye.

Des moniales grecque melkite, il ne reste aujourd’hui que Soeur Christophora et Sœur Anne installées dans la ferme accolée à l’abbaye et rejointes plusieurs mois par an par un hiéromoine (un moine ordonné prêtre).

Visiter l’abbaye

Aujourd’hui et depuis de nombreuses années déjà, l’abbaye est ouverte aux visiteurs qui viennent suivre la visite guidée de ce bâtiment remarquable du 12ème siècle. Depuis 2011, elle offre la possibilité de suivre des conférences et des parcours spirituels, des stages en calligraphie, enluminure et iconographie donnés par des professionnels. L’abbaye accueille également des groupes et des mouvements d’Église voulant passer une journée ou vivre un temps de retraite.

Cloitre de l'abbaye d'Aubazine

Attention, l’abbaye ne peut se visiter qu’en visite guidée et ces visites d’une heure et demie (un peu plus si vous avez la chance de tomber sur Sœur Christophora !) sont programmées en nombre restreint tout particulièrement en dehors des vacances d’été.

Vous trouverez ces horaires ici : https://abbaye.aubazine.com/visites-horaires-tarifs

Veillez à arriver un peu avant l’horaire indiqué car ensuite les portes ferment et il ne vous sera pas possible de rejoindre une visite déjà entamée.

Une chapelle Byzantine au cœur de la Corrèze

Un peu d’histoire

En 1966, deux moines de l’abbaye Notre-Dame de Bellefontaine en recherche d’un rapprochement avec la tradition de l’Orient et avec l’orthodoxie adoptent le rite byzantin catholique et fondent le monastère de la Transfiguration à Aubazine sur un terrain boisé de sept hectares mis à leur disposition par les moniales de la Théophanie qui occupent l’Abbaye depuis peu.

Rejoints par plusieurs autres moines, ils construisent peu à peu une chapelle en bois, un bâtiment communautaire comprenant la cuisine, le réfectoire, la bibliothèque, un bâtiment destiné aux hôtes de passage, un atelier et des cabanes séparées servant de cellules pour les membres de la communauté. Mais Au bout de 10 ans, ils décident de devenir orthodoxes et l’évêque leur demande alors de quitter Aubazine. Une partie des ermitages est démontée ainsi probablement que cette première chapelle Byzantine qui n’est donc pas celle actuellement présente à Aubazine.

En 1985 n’ayant pas reçu des Bâtiments de France la permission de bâtir une église de style byzantin près de l’abbaye, la communauté des Sœurs, quand à elles toujours rattachées à Rome, s’est transportée à la ferme de l’abbaye, qui fait partie de l’abbaye mais qui se trouve en dehors de l’enceinte même. Cette nouvelle chapelle , du plus pur style Byzantin, est construite dans une ancienne grange de la ferme en 1987. En 1989, à la demande des moniales, la chapelle est entièrement peinte par le peintre orthodoxe chilien Juan Echenique.

Visiter la chapelle

Chapelle Byzantine d'Aubazine

La chapelle Byzantine d’Aubazine est un trésor caché du village ! Bien connue des habitants du village, elle est assez peu visitée par les touristes de passage car elle est un peu excentrée du bourg.

Des offices y sont célébrés tous les jours. Ces offices sont ouverts au public.

Comment s’y rendre ? Après l’Abbatiale sur la place principale d’Aubazine prenez la route de Tulle en tournant à gauche. La plaque émaillée Michelin, adossée au mur d’une maison, vous indiquera la direction. Passez devant le lavoir ancien et vous pourrez apercevoir tout de suite à droite le panneau du Monastère Grec-Catholique. A votre gauche un portail rouge : il s’agit de l’entrée du monastère.

L’Église paroissiale et ses insolites secrets

Un peu d’histoire

La première pierre de l’église abbatiale d’Aubazine a été posée et bénie en 1156. Elle est achevée en 1190, et était à l’époque l’une des plus grandes du Limousin, avec une nef initialement composée de neuf travées, soit 92 mètres de longueur !

En 1731, pour réduire les frais d’entretien, l’abbé fait démolir six travées de la nef, ce qui la réduit presque de moitié.

Pendant la Révolution française, l’abbaye étant sécularisée, l’église de l’Abbaye devient l’église paroissiale d’Aubazine.

Classée monument historique en 1840, elle reste un témoignage précieux de l’architecture monastique cistercienne.

Visiter l’église

Contrairement à l’Abbaye qui ne se visite que lors des visites organisées, l’église d’Aubazine est en accès libre.

Elle conserve aujourd’hui plusieurs éléments remarquables, comme un clocher octogonal typique du style limousin, le tombeau de Saint Étienne datant du XIIIe siècle, et des stalles en bois sculptées du XVIIe siècle. Elle abritait également jusqu’en 1905 un trésor d’orfèvrerie, qui a été volé à cette date.

Place de l'église d'Aubazine

Mais l’église abrite encore aujourd’hui un autre trésor bien singulier qui ne paie pas de mine : il s’agit d’une armoire liturgique du XIIe siècle, considérée comme le plus ancien meuble de France ! Et dire que vous alliez passer à côté sans y prendre garde !

Le canal des moines : Une merveille d’ingénierie médiévale

Un peu d’histoire

La source dont le premier monastère s’était contenté, ne pouvait plus suffire à une communauté forte de plus de cent moine, qui avait besoin d’une eau courante et abondante. L’absence de tout cours d’eau sur le site même faillit alors entrainer le transfert vers un site nouveau mieux desservi, et qui eut pu être, en contrebas, la vallée même de la Corrèze.

Mais l’attachement au site primitif, si bien exposé et déjà si bien mis en valeur, l’emporta finalement, et l’on chercha alors une solution autre ; puisque l’eau ne se trouvait pas sur le site, il fallait l’y conduire. Alors les Cisterciens, excellents hydrauliciens, opérèrent ils à 1,5km d’Obazine, sur la partie amont du Coyroux, une capture à partir de laquelle ils aménagèrent un canal, le célèbre « Canal des moines« . Ainsi, après avoir suivi au flanc de la montagne la courbe de niveau de 350 mètres avec une pente constante de 0,5%, l’eau du Coyroux est brusquement lâchée en direction de l’extrémité nord de l’enclos monastique où elle alimente un vaste vivier avant d’aller actionner 3 moulins échelonnés sur la partie aval de son cours.

Visiter le canal des moines

Canal des moines à Aubazine

Une promenade permet de longer ce ruban d’eau douce, restauré en 2010. A noter que cette promenade est interdite aux poussettes et aux chiens.

Avant de parvenir au vivier, toujours présent dans l’enceinte de l’Abbaye, l’eau du canal fait un passage par le lavoir du village. C’est le point de départ de cette agréable promenade, assez fréquentée en été.

Attention, il va vous falloir être courageux sur les premiers 100 mètres car ça monte un peu. Ensuite, comme le canal a été construit avec une très faible pente, c’est une promenade quasiment plate qui vous attend. Si vous souhaitez court-circuiter le début de ballade pour arriver directement sur la partie douce, garez vous à proximité de l’école du village.

En tout début de ballade (vous ne le verrez donc pas si vous avez commencé le canal au niveau de l’école) , l’ancien presbytère héberge lespace muséographique Cistercien consacré à l’histoire du monastère double d’Obazine (masculin) et de Coyroux (féminin). Y sont exposées des maquettes, restituant le monastère d’hommes et le prieuré féminin au XIIe siècle, ainsi que les découvertes effectuées lors des fouilles archéologiques sur le site de Coyroux. Attention aux horaires d’ouverture si vous souhaitez y accéder.

Profitez du fait que le canal surplombe le village pour admirer quelques vues sympathiques sur l’abbaye.

Une fois arrivé à l’embranchement du canal sur le Coyroux, vous pouvez soit revenir sur vos pas, soit suivre une des boucles de randonnée qui vous est proposée.

Le monastère du Coyroux : une histoire méconnue

Un peu d’histoire

Lorsque l’ermite Etienne s’installe à Obazine, non loin de là, une communauté de femmes se forme également autour de Gauberte, la mère d’Étienne. Tandis que les hommes s’occupent des travaux des champs, elles préparent les repas, confectionnent les vêtements. Libres de leurs mouvements, les femmes vivent dans des logis séparés, à quelque distance du monastère où sont les hommes. Elles ne les voient que pour participer à la vie religieuse.

Mais Étienne estime que « des femmes ne peuvent vivre longtemps en toute honnêteté parmi les hommes ». Aussi en vient-il à envisager le principe du monastère double : deux communautés vivant bien séparées, sous l’autorité d’un même abbé. Les hommes vont demeurer à Obazine, sur les hauteurs, tandis que les femmes vont être cloîtrées à 600 mètres de là, au fond du vallon où court le ruisseau Coyroux. Les travaux du monastère de femmes commencent en 1140.

La principale originalité de ce type de monastère double est d’ordre économique. Ne possédant ni terres ni dépendances, tenues dans une clôture absolue, les femmes du Coyroux n’ont pas de ressources. Ce sont les moines qui sont tenus de pourvoir à la subsistance des moniales. Le ravitaillement est assuré grâce à un sas. Le frère procureur dispose de la clef de la porte extérieure. La sœur portière dispose de la clef de la porte intérieure. Le frère entrepose les provisions dans le petit couloir qui sépare les deux portes, puis sort, et frappe un coup de bâton sur la porte extérieure pour signaler qu’il l’a bien refermée.

Plus tard, devant les difficultés économiques du monastère des hommes, le monastère du Coyroux retrouvera son indépendance.

A partir du XVIIème siècle les effectifs vont commencer à décliner. Vers 1720, elles ne sont plus que 19 religieuses, trois valets et quatre servantes. En 1741, elles sont huit religieuses et une sœur converse.

À la Révolution, en 1790, il reste ne reste que douze moniales au Coyroux au moment où le monastères est fermé. Il est ensuite vendu à un carrier qui va en commencer le démantèlement. Très vite il ne reste debout plus que quelques murs de l’église.

En 1976, des fouilles sont entreprises par le Centre de recherches historiques et archéologiques médiévales de l’université de Limoges.

Visiter le monastère du Coyroux

A l’écart du bourg d’Aubazine, le monastère est aujourd’hui une ruine. Il n’y a donc pas grand chose à visiter mais on peut encore y profiter de la sérénité monacale du lieu. On y trouve quelques grands pan de murs et les traces des fouilles actuellement encore en cours.

On peut également aller à pied d’un monastère à l’autre comme au temps du monastère double par le chemin (fléché) dit “chemin des moines”, à ne pas confondre avec le “canal des moines”.

Monastère du Coyroux à Aubazine

Aubazine et ses légendes : Entre mystère et tradition

Tout autour de Coco

Clocher de l'abbaye d'Aubazine

Si on sait par ses biographes que c’est à l’orphelinat de l’Abbaye d’Aubazine que Gabrielle Chanel, dite Coco Chanel, a appris à coudre, beaucoup d’autres choses ont été affirmées qui sont beaucoup moins certaines !

Ainsi la forme octogonale du bouchon du parfum Chanel n°5 serait inspirée du clocher de l’Abbaye, lui aussi octogonal. Il suffit d’observer le dit bouchon pour se rendre compte que la similitude est vraiment très lointaine. En réalité le bouchon reprendrait la forme de la place Vendôme à Paris, là où Coco Chanel vécue un temps. Que peut faire une légende Corrézienne face à la Capitale…

De manière plus plausible, le logo de Chanel, qui ressemble à deux C dos à dos, serait directement reprise des grisailles cisterciennes de l’Église. S’il ne devait rester qu’une légende sur Coco Chanel à Aubazine, cela serait probablement celle-ci !

On dit aussi que la célèbre “petite robe noire” de la maison Chanel serait une évocation de l’habit noir des sœurs de l’orphelinat. Quand on sait le désamour de Gabriel pour ces sœurs qui lui rendait la vie si stricte il est étonnant de se dire qu’elle ait un jour pu ressentir de la nostalgie pour elles… mais le cœur a ses raisons …

Encore plus tiré par les cheveux, certains n’hésitent pas à affirmer que le dernier parfum Chanel sorti du vivant de Gabriel serait un hommage direct au département de la Corrèze : Chanel n°19 ! Même si le 19 est aussi le jour de naissance de Coco Chanel…

Mais le plus incroyable en matière de légende autour de Coco Chanel est sans aucun doute le fait qu’il serait possible que Coco Chanel n’ait jamais mis les pieds à Aubazine ! C’est ce qu’affirme un généalogiste qui s’appuie sur des recensements qui localisent Gabrielle à Thiers à une époque où elle devait être à Aubazine. La seule Chanel à Aubazine à cette époque était Adrienne, tante et meilleure amie de Gabrielle Chanel. La légende d’Aubazine aurait été créée par Edmonde Charles-Roux dans son livre L’Irrégulière et reprise par la suite par tous les biographes. Mais n’évoquez JAMAIS cela si un jour vous allez à Aubazine !

Et au delà de Coco

Il y existe une autre légende autour d’Aubazine qui ne se rapporte pas à Coco Chanel. Elle est certes originale mais aussi très confidentielle. Croisée une fois dans un livre de recettes du Limousin -vous comprendrez plus bas pourquoi- elle ne laisse de traces nulle part ailleurs et son degré de plausibilité est vraiment faible ! Mais comme elle est amusante on vous la raconte quand même !

Nous voici donc au temps du monastère double, l’époque où les moines apportaient la nourriture au monastère des femmes par un très strict système de sas (voir plus haut). Pour une raison que l’histoire n’a pas retenue, une brouille advint entre les moniales et les moines. Comme la querelle commençait à durer et que les femmes commençaient à craindre que cela ne nuise à leur approvisionnement en ressource, elles décidèrent de faire un acte de paix. Elles confectionnèrent une petite pâtisserie que le moine chargé de leur approvisionnement allait trouver dans le sas au moment de sa venue.

Comprenant le message, le frère serait revenu au monastère en annonçant à ses collègues : “voici la paix des nonnes”. Puis le temps déforma le nom pour devenir les pets de nonnes !

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